La réponse à cette question n’est pas certaine. Seule une modification politique pas facile à mettre en œuvre ou un changement de personne le permettra… peut-être!
Article publié le 21 mars 2019 dans Gauchebdo par Alain Bringolf
Nous avons souvent relaté l’obsession du Conseil d’Etat neuchâtelois, qui ne voit que les économies à faire dans tous les domaines possibles. Et ce, afin de favoriser les riches en estimant que c’est de là que viendra le bonheur, ce mouvement porté par le dogmatique besoin d’argent. La baisse de la fiscalité sur le bénéfice des entreprises, les réductions d’impôts largement favorables aux plus aisés, la rationalisation des services publics, dont les salarié-e-s sont soumis à des contrôles drastiques afin de découvrir où est-il encore possible de faire des économies, sont devenus au fil des années une marque de fabrique du gouvernement.
La fixation d’un seuil trop bas d’accès aux subsides d’assurance maladie dans le canton, qu’a désavouée le Tribunal fédéral, est l’avant-dernier revers enregistré. Le dernier en date découle d’une décision récente du même Tribunal. Il remet en cause la décision du conseil d’Etat de limiter le nombre des patients hospitalisés hors du canton. La haute instance judiciaire du pays a accepté un recours des associations d’hôpitaux et de cliniques contre la décision de Laurent Kurth et consorts, qui devront revoir leur pratique.
Volonté d’économies
La décision cantonale prise en 2018 voulait soumettre les établissements situés hors canton aux mêmes exigences que les hôpitaux neuchâtelois, soumis eux-mêmes à divers plafonnements, à l’exception des cas d’urgence. Dans les faits, les hôpitaux visés devaient obtenir une garantie de prise en charge par le canton des frais pour chaque patient désirant se faire soigner hors canton. Si le Canton refusait le cas, celui-ci ne payait pas sa part.
Mais le Tribunal fédéral a estimé qu’un Canton ne pouvait pas se prononcer sur un mandat de prestation concernant des établissements hors canton. Pour qu’il puisse intervenir, il devait préalablement les inscrire sur sa propre liste hospitalière, ce qui n’était pas le cas dans la décision désavouée par le TF.
D’un point de vue politique, ces complications administratives relèvent de l’application des règles du néolibéralisme par les diverses autorités du pays. Ainsi la Confédération a décidé que la règle de la concurrence était une bonne solution pour faire baisser les coûts. Elle a contraint les établissements publics à se mesurer aux cliniques et hôpitaux privés. Un choix qui provoque inévitablement la guerre économique entre les centres de soins. Pour en faciliter la compréhension par la population, la mesure était présentée comme une décision permettant à chaque malade de décider en fonction de son choix de l’endroit où se faire soigner. Une mesure qui, au surplus, renforce la suprématie de l’individualisme régnant dans notre type de société. Ces volontés d’économies veulent favoriser les plus puissants, en leur offrant les garanties nécessaires à leur prospérité si possible éternelle.
Une telle pratique politique applique avec rigueur les règles du capitalisme globalisé du XXIe siècle et fait de l’accroissement éternel de la valeur, de la production et de la consommation les buts placés au dessus de tous les autres. Tous les actes gouvernementaux sont soumis à l’injonction suprême du marché et de sa main invisible au détriment des biens de base des populations. Les êtres humains se retrouvent au service des intérêts du commerce. Cette stratégie provoque à la fois les débordements des peuples et un glissement nationaliste, chacun à sa manière tentant de trouver des réponses à une situation qui devient chaque jour de plus en plus insupportable pour de plus en plus de personnes. Ce qui fait dire à un gilet jaune entendu dans un reportage: «J’ai le sentiment d’être transparent». Un tel sentiment est indigne d’une civilisation s’autoproclamant à la tête de l’évolution humaine.