Etudier dans une ES coûtera le double

Etudier dans une ES coûtera le double

Publié le  par Talissa Rodriguez dans Gauchebdo

Neuchâtel • Le Conseil d’Etat a décidé de doubler les taxes d’écolage des Ecoles Supérieures pour les filières à plein-temps, arguant qu’il évitera ainsi leur fermeture. Les jeunes POP et le SSP annoncent la création d’un front large pour s’opposer à cette mesure d’austérité.

«L’actuel projet du Conseil d’Etat, qui consiste à doubler les frais d’écolage des Ecoles Supérieures (ES), s’inscrit dans une tendance générale d’augmentation des taxes d’études et d’austérité dirigée contre les couches modestes de la société, et en particulier les jeunes». Dans un communiqué, les jeunes POP se disent indignés et déçus par la décision du Conseil d’Etat de doubler les taxes d’écolage des ES pour les cursus à temps plein, qui passeront de 1’000 à 2’000 francs. Pour le gouvernement pourtant, dont le budget du plan de législature 2018-2021 prévoyait 41 mesures d’économies se chiffrant en millions pour chaque département, l’augmentation des taxes d’écolage constitue une solution équilibrée, permettant d’éviter la fermeture de ces filières .

Un argumentaire auquel ne croit pas le député popiste Armin Kapetanovic, qui a posé en septembre une question au Conseil d’Etat. « Cette décision relève davantage d’une vision de société que d’une volonté de réaliser de véritables économies. Je pourrais entendre qu’il y ait une certaine adaptation des taxes. Mais passer du simple au double, ça vise plutôt à casser une filière. En effet, une économie de 200’000 francs a un impact quasi nul sur le budget de l’Etat ». Pour le député, cette augmentation pourrait toutefois pousser les étudiants à suivre leur formation dans d’autres cantons, là où les taxes d’écolage se situent entre 700 et 1500 francs, avec pour conséquence une baisse des effectifs dans les ES cantonales et le risque de devoir fermer des classes. « Les vraies économies pour l’Etat seront réalisées dans un deuxième temps, s’il peut fermer des classes, voire des filières entières. Je regrette cette vision de la société à deux vitesses, qui cherche à rayonner à travers l’université, et qui démantèle les structures d’enseignement intermédiaires qui existent entre l’université et l’apprentissage dual. En dissuadant les gens de se former, on crée les précaires de demain ».

Erosion d’étudiants

Jérôme Amez-Droz, secrétaire général du département de l’éducation et de la famille, n’exclut pas non plus une érosion des étudiants, mais tient à nuancer : « S’il n’est pas impossible que l’effectif diminue, il faut tenir compte des autres critères dans le choix d’une formation. En effet, à Neuchâtel, nos cursus se caractérisent par une très haute qualité d’enseignement, par leur spécificité ainsi que par notre lien privilégié avec le tissu économique régional. Ainsi, notre canton importe beaucoup d’étudiants. Sur les 586 inscrits dans nos ES en 2017, 160 venaient de l’Arc Jurassien, qui n’offre pas ces filières ».

Léa Ziegler, secrétaire syndicale au SSP et responsable romande du projet Jeunes, n’en est pas si sûre. «La concurrence intercantonale dans le domaine de la formation est forte. Une ES en éducation spécialisée de l’enfance va ouvrir prochainement à Fribourg. Les élèves risquent de ne pas y réfléchir à deux fois si l’inscription est moins chère ailleurs». Elle dénonce elle aussi un démantèlement des filières ES. «Nous demandons le retrait de cette mesure, qui reporte les coûts sur les étudiants et leurs familles». Le SSP et les jeunes POP ont déjà annoncé qu’ils combattront la mesure, dans le cadre d’un front de résistance. n

Talissa Rodriguez